Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a précisé les critères à retenir pour caractériser une situation de coemploi au sein d’un groupe de sociétés.
La reconnaissance d’une situation de coemploi a pour objet de sanctionner des relations anormales entre deux sociétés, afin que la société qui s’immisce de manière anormale dans la direction d’une autre société assume les responsabilités attachées au statut d’employeur.
Dans son arrêt du 25 novembre 2020, la Cour de cassation a rappelé que la situation de coemploi peut être retenue :
- Soit en présence d’un lien de subordination ;
- Soit, au sein d’un groupe de société, lorsqu’il existe une immixtion permanente d’une société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d’autonomie d’action de cette dernière.
En l’espèce, il s’agissait d’une société reprise en 2010 par un groupe japonais, qui avait licencié ses salariés pour motif économique en 2012. Les salariés ont contesté leur licenciement en mettant en cause leur employeur officiel, mais également la société mère, en qualité de coemployeur.
La Cour d’appel de CAEN a accueilli ces demandes en constatant que les interventions anormales de la société mère dans la gestion administrative de la filiale illustraient une confusion de direction, d’activité et d’intérêt.
Mais la Cour de cassation a décidé que les conditions du coemploi n’étaient pas réunies dans la mesure où l’immixtion de la société mère n’était pas permanente et la filiale avait conservé une certaine autonomie d’action.
Certains commentateurs y ont vu la mort du coemploi alors qu’il n’en est rien. La Cour de cassation aurait pu exclure par principe la reconnaissance du coemploi au sein des groupes de sociétés, en visant la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe, et l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer.
Mais ce n’est pas la position adoptée par la Cour de cassation. Au contraire, elle confirme que ce type de situation existe en précisant que l’ingérence abusive dans la gestion économique et sociale d’une société privant une autre société du groupe de ses prérogatives et de sa totale autonomie décisionnelle permet de caractériser un cas de coemploi, dès lors que cette immixtion est permanente.
Certes, les situations de coemploi restent exceptionnelles, mais c’est par nature la structure de notre règlementation basée sur des principes assortis d’exceptions.
Cassation, Chambre Sociale, 25 novembre 2020, n° 18-13769
Article rédigé par Christelle Cerf pour le cabinet Axiome Avocats spécialisé en droit du travail à Lyon.