Le salarié qui, au cours de l’exécution de son préavis de licenciement pour motif réel et sérieux ou de démission, commet une faute grave, peut-il voir son préavis interrompu ?
La Cour de cassation s’est récemment prononcée sur un tel cas.
En l’espèce, un salarié d’une association s’était vu notifier un licenciement pour motif personnel. Au cours de l’exécution de son préavis, l’intéressé a adressé une lettre au président de la fédération Autisme 42, l’autorité de tutelle de son employeur, dans laquelle il avait sciemment détourné le sens d’une recommandation de lecture du psychiatre de l’établissement et dénigré l’association qui l’employait.
L’employeur prit en conséquence l’initiative d’interrompre le préavis du salarié en avançant la qualification de faute grave. L’intéressé saisit alors la juridiction prud’homale de diverses demandes indemnitaires, dont celle en paiement du solde de l’indemnité de préavis non exécuté.
La Cour de cassation a validé le raisonnement et appliqué une jurisprudence constante. En effet, la faute grave impliquant l’impossibilité de maintenir le salarié dans l’entreprise, il apparait approprié de considérer que le préavis ne peut plus continuer à être exécuté et le salarié peut dès lors être licencié pour faute grave pour une faute commise durant l’exécution du préavis.
L’on notera que dans cette hypothèse, et bien que cela ne soit pas explicité dans l’arrêt, l’employeur n’a pas à recommencer la procédure de licenciement lorsqu’il interrompt le préavis pour faute grave du salarié [1].
Quid de l’indemnité de préavis ?
Après avoir considéré les faits et avoir validé la qualification de faute grave, la Cour de cassation a fait application des règles consacrées en la matière : la faute grave dispense l’employeur du paiement d’une indemnité compensatrice de préavis.
Au cas d’espèce, la Cour a rappelé ce qu’elle avait déjà consacré dans d’autres décisions. Ainsi, la faute commise au cours du préavis ou commise avant la date de résiliation du contrat, mais révélée ultérieurement à l’employeur a pour effet d’interrompre celui-ci et de priver le salarié de la partie de l’indemnité compensatrice de préavis correspondant à celle de la période restant à courir jusqu’au terme du préavis[2].
Quid de l’indemnité de licenciement ?
Cette situation pourra toutefois porter à interrogation concernant l’indemnité de licenciement versée au salarié avant la commission de cette faute durant l’exécution de son préavis.
La faute grave privant normalement l’intéressé de son droit à l’indemnité légale (ou conventionnelle) de licenciement, qu’advient-il de cette indemnité lorsque le salarié commet une faute grave au cours d’exécution de son préavis ?
Si l’arrêt présentement commenté ne répond pas directement à cette question, la jurisprudence en la matière est aujourd’hui bien assise, de sorte que l’on doit considérer que la faute grave commise ou découverte au cours du préavis ne prive pas le salarié de l’indemnité de licenciement[3].
[1] (Soc. 15 janv. 2002, n° 98-45.655)
[2] (Soc. 4 juill. 2007, n° 05-45.221, RJS 10/2007, n° 1057 ; 12 déc. 2001, n° 99-45.290, RJS 2/2002, n° 169)
[3] (Soc. 3 juill. 1990, n° 87-40.219 P, RJS 8-9/1990, n° 666)
Article rédigé par Arthur Gandolfo pour le cabinet Axiome Avocats spécialisé en droit du travail à Lyon.